20201006_ImgSite

Covid-19 : le symptôme d’une Europe dépassée ?

Une opinion de G. Bruck, L. Hidalgo, J. Liégeois, F. Rasseneur, A. Servais et G. Soupart, Jeunes MR.

L’épidémie du Covid-19 vient s’ajouter à la polycrise que connaît l’Union européenne depuis une dizaine d’années (crise migratoire, montée des populismes, Brexit, cohésion de la zone euro, défi climatique…). Elle pourra en sortir grandie. Et si cela devait se traduire par un changement de modèle et par la consécration d’une Union européenne fédérale ?

Malheureusement, c’est le chaos qui a, dans un premier temps, régné en Europe. Le débat oscillant entre coronabonds et fonds de solidarité au sujet d’une réponse financière solidaire de l’Union a été l’un des plus gros scandales de la crise que nous connaissons actuellement. La Présidente de la Commission européenne a même été jusqu’à présenter des excuses publiques aux citoyens italiens pour le manque de solidarité et de réactivité de l’Union. En Europe de l’Est, Varsovie et Budapest semblent profiter de la crise pour asseoir leur démocratie illibérale. Un autre exemple de cacophonie européenne est les réquisitions et saisies tous azimuts par différents pays de matériel destiné à leurs voisins.

Ensuite, l’Union

L’Union européenne, fidèle à sa devise In varietate concordia, prend des initiatives malgré les cris d’orfraie des détracteurs du projet européen et de la désinformation de Moscou et Pékin. En effet, il est de bon ton de rappeler que l’UE ne définit pas les politiques de santé, ni l’organisation et la fourniture de services de santé et de soins médicaux, contrairement aux gouvernements nationaux. Son action consiste à compléter les politiques nationales et à soutenir la coopération entre les États-membres dans le domaine de la santé publique.

Dans cette crise, nous constatons que chaque institution européenne a usé des instruments qui sont à sa disposition pour atténuer les conséquences de la pandémie et ce, même si la mise en place de ces mesures fut tardive – ce que nous regrettons. Dans ce sens, les Ministres des Finances ont trouvé un accord sur une série d’aide financière et un fonds de relance pour sortir l’UE de cette crise économique.

Au niveau du Parlement européen

Le Parlement européen a voté en faveur d’une mobilisation de 37 milliards d’euros d’investissements publics pour faire face à la crise se basant sur différents fonds créés pour soutenir les États-membres et les pays en voie d’adhésion dans des situations de catastrophe majeure.

Au niveau de la Commission européenne

La Commission européenne a décidé de fermer les frontières extérieures. Il faut garder à l’esprit qu’instaurer un état de « confinement » et fermer les frontières d’un pays ne peut se décider qu’au niveau national. Parallèlement, elle a mobilisé 140 millions d’euros de fonds de l’UE pour soutenir la recherche visant à mettre au point un vaccin, des nouveaux traitements et des tests de diagnostic.

Elle a alloué 47,5 millions d’euros à 17 projets de recherche contre le Covid-19. Un investissement total de 90 millions d’euros est prévu dans l’Initiative en matière de médicaments innovants (IMI), un partenariat public-privé entre la Commission et l’industrie pharmaceutique. Ajoutons à cela qu’une aide financière de 80 millions d’euros a été octroyée à une entreprise spécialisée dans le développement de vaccins. Aussi, la Commission exonère de droits de douane et de TVA les importations d’équipements médicaux en provenance de pays tiers.

De plus, la Commission a le rôle de contrôler les aides financières octroyées par les États à leurs entreprises nationales. Dans une communication, elle a souligné que les règles de l’Union aux États-membres peuvent servir à soulager les entreprises, en particulier les PME afin de leur permettre de surmonter la crise.

L’Union européenne répond aussi à la critique quant à sa rigidité sur le plan des finances étatiques en suspendant le Pacte de stabilité pour permettre aux États-membres de dépenser autant d’argent que la crise actuelle le demande.

Vers une Union Fédérale Européenne

Suite à ces différents éléments, nous ne pouvons que rappeler leur positionnement prônant une réforme de l’Union européenne actuelle : nous souhaitons la mise en place d’un Espace Européen (EE) qui reprendrait les contours de l’Union à 27 et qui aurait les compétences exclusives d’une zone de libre-échange, et d’une Union Fédérale Européenne (UFE) à l’intérieur même de l’EE, qui pourrait correspondre à la Zone Euro actuelle (18 membres) et dont les compétences comprendraient un ensemble de matières intégrées au niveau européen.

Il est temps de donner à l’Europe les moyens de ses ambitions. Et cela passera inévitablement par plus d’Europe. Car si cette crise nous montre une chose, c’est la nécessité d’une réponse coordonnée.

Dans le cadre d’un tel projet, il va de soi qu’une redistribution des compétences semble nécessaire voire inévitable pour permettre à l’Union de légiférer et donc de poser des actes contraignants envers les États. Cela devrait se faire pour des compétences qui jusqu’à maintenant relevaient en grande partie de la souveraineté des États-membres. À titre d’exemple, la santé, la fiscalité ou même la défense avec la création d’une armée européenne pourraient dès lors être du ressort de l’UFE. Pour rendre l’Europe plus efficace, il faut plus d’Europe, une Europe simplifiée et transparente.

Une agence européenne unique pour la gestion de crise sanitaire

En 2015, certains s’exprimaient en faveur de la mise sur pied d’une entité médicale globale – en parallèle à l’OTAN – qui, s’occuperait d’éventuelles crises sanitaires mondiales. Pour le moment, nous ne pouvons que constater et regretter que la coordination de différents outils européens n’est pas à la hauteur : l’Europe possède des outils salvateurs, le Centre de Coordination de la Réaction d’urgence (CCRU) et le Centre Européen de Prévention et de Contrôle des Maladies (CEPCM). L’un permet la coordination des mécanismes de protection civile européens, l’autre est une agence européenne chargée de la prévention et du contrôle des maladies et affections transmissibles.

Mais pourquoi ces outils ne sont-ils pas utilisés au maximum de leur potentiel ? En temps de crise, une réponse dynamique et rapide est indispensable. Dans une Union Fédérale Européenne (UFE), ces deux entités – qui pourraient être fusionnées – seraient les moteurs d’une réponse efficace à une crise sanitaire comme celle que l’on connaît aujourd’hui. Cela passerait par une gestion logistique et préventive du matériel en termes de déploiement, de quantité et d’accès (masques, gants, EPI, tests de diagnostic, respirateurs, …) mais aussi par une capacité de mobilisation de moyens humains (docteurs, infirmiers, ambulanciers, …) à travers l’Europe.

Elles seraient chapeautées par une Direction Générale de la Santé attachée à un Commissaire européen spécifique. Elles permettraient de réaliser des simulations à grande échelle contre les virus ou toute autre pandémie et permettraient de développer une réponse coordonnée, organisée et régulée selon un schéma prédéfini. Le corps médical serait donc formé et professionnalisé permettant ainsi, une action rapide.

Avançons, ensemble, vers plus d’Europe

Notre société est en évolution permanente. La crise que nous traversons nous fait prendre conscience qu’il faut avancer et s’améliorer. Empêcher le projet européen de se réformer en parallèle est un non-sens. Il faut se souvenir que tenter de répondre aux problèmes du siècle prochain avec des réponses du précédent n’a aucun sens. Les pères fondateurs du projet européen que sont Schuman, Monnet ou Spaak n’avaient jamais rêvé d’une institution figée dans la pierre. L’Union Économique et Monétaire n’était qu’une étape comme l’a été la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier (CECA). Soyons les dignes héritiers du rêve européen et donnons à notre Union les outils pour répondre aux problèmes de demain.

Tu as aimé ? Alors partage

Facebook
Twitter
LinkedIn

Toi aussi, deviens membre !