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Automobile : gage de souveraineté et de transition climatique en Europe

Le 4 novembre 2025, devant les représentants de la Plateforme française automobile (PFA), Stéphane Séjourné, vice-président de la Commission européenne chargé de l’industrie, a assuré qu’une partie de la stratégie industrielle européenne devait désormais résider dans la (re)construction de capacités de production européennes. Cette déclaration témoigne de la prise de conscience, au plus haut niveau, de l’importance vitale de l’industrie automobile pour la souveraineté économique et la transition écologique de l’Union.

Aujourd’hui encore, l’industrie automobile est un pilier stratégique de l’économie européenne. Elle pèse plus de 13 millions d’emplois directs et indirects répartis dans des domaines variés, de l’ingénierie à la sous-traitance. À elle seule, elle représente plus de 10 % des emplois manufacturiers européens et est présente dans de nombreuses régions, de la Pologne à l’Espagne en passant par l’Italie et l’Allemagne. Elle constitue également un moteur d’innovation de premier plan, puisque près de 30 % de la recherche et développement (R&D) privée européenne se concentre dans ce secteur. Préserver cette filière, c’est donc préserver un socle industriel, technologique et humain essentiel à la prospérité de l’Europe.

Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille renoncer à la transition écologique, bien au contraire. Les objectifs européens en la matière, à savoir la neutralité carbone d’ici 2050 et une réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, doivent être atteints. Cependant, pour y parvenir, la stratégie européenne doit rester pragmatique, en adoptant une approche technologiquement neutre et économiquement réaliste.


L’électrification des véhicules est un levier central, mais ne peut être la seule solution. Elle doit être complétée par le développement d’autres solutions, telles que les carburants de synthèse, les biocarburants avancés, le diesel renouvelable, l’hydrogène ou la conversion des véhicules existants. Cette diversité technologique, rendue possible par la recherche européenne, est l’un de nos meilleurs atouts pour opérer la transition avec l’industrie, et non contre elle.

Pourtant, l’industrie automobile européenne est confrontée à des défis majeurs.

La transition vers le véhicule électrique bouleverse en profondeur les chaînes de production et rend l’Europe dépendante de composants produits en dehors du continent, notamment les batteries, les semi-conducteurs et les métaux critiques. À cela s’ajoute une multiplication des normes techniques et environnementales, souvent mouvantes et fragmentées, qui complexifient l’activité des constructeurs et détournent une part croissante de leurs budgets de l’innovation vers la conformité.

Parallèlement, l’Europe est confrontée à la concurrence agressive de constructeurs chinois et américains, capables de produire plus rapidement et à moindre coût grâce à des chaînes d’approvisionnement intégrées et à des soutiens publics massifs.

Il ne suffit donc plus de « tenir » la filière automobile : il faut la reconstruire dans la durée, autour de trois piliers clés.


Il faut d’abord relocaliser les chaînes de valeur critiques, en développant une filière européenne des batteries, des métaux et du recyclage. Cela implique de sécuriser l’accès aux matières premières, d’exploiter de manière responsable les gisements européens et d’investir massivement dans le recyclage des composants stratégiques afin d’assurer un approvisionnement local et souverain.

Ensuite, il faut alléger la pression réglementaire, sans pour autant baisser les standards environnementaux, mais en stabilisant le cadre normatif, en réduisant les contradictions entre directives et en donnant de la visibilité aux industriels sur le long terme.

Enfin, il faut investir dans l’innovation et la compétitivité : soutenir la recherche et le développement, faciliter la formation et la reconversion des travailleurs, renforcer la coopération entre États, universités et entreprises et rendre la fiscalité plus incitative pour les technologies à faible empreinte carbone.

Maintenir une industrie automobile forte et souveraine est donc bien plus qu’un enjeu sectoriel, c’est la condition sine qua non de l’ambition climatique européenne.

L’Europe doit produire ce qu’elle prescrit, dans une approche équilibrée, sans étouffer son industrie sous un excès de contraintes administratives. Une politique industrielle européenne cohérente, associant transition écologique, souveraineté et compétitivité, doit voir le jour pour que l’Union ne se contente pas d’être une simple « réglementatrice » du progrès, mais qu’elle en devienne l’un des moteurs.

Il est désormais urgent d’agir pour que l’alliance entre industrie et climat devienne le véritable atout de l’Union européenne dans la décennie à venir : une Europe capable d’assurer sa transition écologique tout en reconstruisant sa puissance industrielle.

Arthur Watillon

Délégué Développement durable, Environnement, Bien-être animal, Energie, Mobilité et Logement

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