Les crises successives qui secouent la société n’épargnent pas les jeunes, et les conséquences se font lourdement sentir. Child Focus, l’organisation belge dédiée à la protection des enfants disparus et exploités sexuellement, dresse un constat alarmant. En 2022, le nombre de cas de disparition et d’exploitation sexuelle a bondi de 32 %, marquant la plus forte augmentation depuis la création de l’organisation. L’année dernière, près de 5 000 nouveaux dossiers ont été ouverts, dont une grande majorité liée à des fugues et des formes d’exploitation sexuelle en ligne. Parmi les 1 515 cas de disparition signalés, 1 138 concernaient des fugues, un triste record.Les raisons de cette hausse sont multiples : les crises sanitaires, migratoires et énergétiques ont eu un impact considérable sur les familles et les jeunes, exacerbant les vulnérabilités. De plus, l’influence grandissante des réseaux sociaux contribue à l’augmentation des cas de sextorsion, de grooming et d’autres formes d’exploitation. Selon Heidi De Pauw, directrice générale de Child Focus, les réseaux sociaux sont souvent utilisés par des individus malveillants pour approcher des mineurs à des fins d’abus sexuels. En parallèle, les fugues sont de plus en plus fréquentes chez les jeunes en détresse psychologique, souvent liés à des troubles mentaux ou des idées noires.
Face à cette situation, la fondation voit ses ressources humaines et financières mises sous pression. En 2023, l’organisation a reçu 21 866 appels, une augmentation de 39 % par rapport à l’année précédente, dont beaucoup émanaient de jeunes en crise psychologique ou de parents inquiets. Pourtant, malgré une mobilisation massive de la société civile et des entreprises, le financement de l’organisation reste précaire. Seulement 19 % de ses ressources proviennent du gouvernement, via la Loterie Nationale, le reste dépendant largement des dons privés, qui ne suffisent plus à répondre à la demande.
Pourtant, Child Focus continue d’honorer son engagement initial : ne laisser aucun appel à l’aide sans réponse. L’organisation est présente 24h/24, 7j/7, grâce à sa ligne d’urgence gratuite (116 000), et elle utilise des technologies innovantes pour traquer les images d’abus sexuels d’enfants. Elle a également lancé des initiatives telles que CyberSquad, une plateforme où les jeunes peuvent échanger de manière anonyme avec leurs pairs ou des experts pour faire face aux défis en ligne.Cependant, sans financement structurel supplémentaire de l’État, l’organisation risque de ne plus pouvoir assumer ses missions essentielles. Pour la deuxième année consécutive, l’organisation clôture son exercice dans le rouge. « Le financement reste fragile », explique Heidi De Pauw, soulignant l’urgence d’un soutien financier accru pour répondre aux besoins croissants, tant en matière de prévention que d’intervention.
Child Focus rappelle qu’il est crucial de continuer à sensibiliser et à protéger les enfants face aux risques grandissants, en ligne comme hors ligne. Chaque citoyen peut contribuer à cette mission, et l’organisation a récemment relancé sa campagne « Ramenez-les », appelant à la solidarité pour combler le manque de fonds et continuer à offrir espoir et protection aux enfants en danger.