Le 14 février dernier, la SNCB dévoilait sa « nouvelle gamme tarifaire plus claire et plus simple ». Une communication bien huilée qui promet des réductions durant les heures creuses et des avantages pour les voyageurs réguliers. Mais que cache réellement cette réforme ?
La société nationale entend revoir entièrement sa politique tarifaire, avec un objectif ambitieux à l’horizon 2032 : augmenter de 30% le nombre de voyageurs. Dans cette optique, toute la gamme des tickets est repensée – sauf les abonnements, qui, eux, feront l’objet d’une refonte en 2026.
Première mesure concrète : le tarif maximum, auparavant calculé sur une distance de 150 km, sera désormais plafonné à 120 km. Une bonne nouvelle pour les trajets les plus longs, avec une économie potentielle allant jusqu’à 20%.
Moins d’options, plus de lisibilité ?
La SNCB fait le ménage dans ses formules : disparition du Week-end Ticket, mais application automatique d’une réduction de 30% les samedis, dimanches et jours fériés. De même, les Youth, Senior et BIM Tickets fusionnent en un seul type de ticket, avec une réduction uniforme de 40%. Les formules « Multi » (Youth Multi, Local Multi, Standard Multi) ainsi que la réduction Familles nombreuses passent aussi à la trappe.
Sur le papier, cela semble aller dans le bon sens : moins de formules, plus de clarté. Le slogan « plus simple » semble tenir la route… du moins jusqu’à ce qu’on se penche sur la pièce maîtresse du nouveau système : la carte Avantage.
La carte Avantage…
Pour bénéficier des fameuses réductions en heures creuses, il faudra acquérir cette carte : 6€/mois ou 48€/an pour les adultes, et 4€/mois ou 32€/an pour les 12-25 ans.
En contrepartie ? 40% de réduction sur le tarif standard en heures creuses, ainsi qu’une réduction supplémentaire sur les trajets déjà réduits du week-end, pour atteindre jusqu’à -70% en combinant les deux. Un système attractif pour certains voyageurs, mais qui impose une connaissance précise des horaires.
Le casse-tête des heures creuses…
La SNCB définit les heures creuses comme suit : du lundi au vendredi, de 0h à 6h, de 9h à 16h et de 18h à 00h. En dehors de ces plages, c’est l’heure de pointe, au tarif plein.
Cette distinction stricte crée des situations aberrantes : un départ à 17h59 sera facturé plein tarif, mais celui de 18h01 bénéficiera d’une réduction de 40% avec la carte Avantage.
Un billet par train : la rigidité plutôt que la flexibilité
Plus problématique encore : la SNCB s’oriente vers un système où chaque billet sera valable uniquement pour un train spécifique, sur le modèle italien. Actuellement, un billet est valable pour n’importe quel train durant toute la journée d’achat.
Cette évolution soulève de nombreuses questions : que se passera-t-il en cas d’annulation ou de retard, situations malheureusement courantes pour les voyageurs belges ? Devra-t-on repasser à la caisse si l’on passe d’une heure creuse à une heure de pointe en raison d’un imprévu ? Sera-t-on remboursé dans le cas contraire ?
Le vélo, le grand perdant ?
Un mot encore sur le ticket vélo, qui évolue lui aussi : de 4 € aujourd’hui, il passera à 3 € en heures creuses, week-ends et jours fériés, mais grimpera à 5 € en heures de pointe. Une tarification dissuasive, alors même qu’on encourage la multimodalité.
Vers un ticket unique de transport…
Ces derniers mois, tant au niveau régional que fédéral, les déclarations politiques parlaient de la création d’un ticket unique entre opérateurs (SNCB, TEC, De Lijn, STIB). Une belle ambition de simplification, qui permettrait une mobilité réellement multimodale.
Pourtant, dans sa communication sur la nouvelle tarification, la SNCB ne fait à aucun moment mention d’une quelconque compatibilité avec les autres réseaux. Pire, avec cette carte Avantage qui semble exclusive à son propre réseau, on peut se demander si l’on ne s’éloigne pas d’un système interopérable.
Une simplification… pensée sans les usagers ?
Il est difficile de croire que ce système ait été conçu par – ou même testé avec – de vrais usagers réguliers. Derrière la promesse de clarté, on découvre un fonctionnement contraignant, potentiellement source de frustration, surtout pour celles et ceux qui subissent les aléas du rail.