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Jeunesse et libéralisme

Jeune, on découvre le monde, sa beauté, mais également ses failles, entraînant une volonté d’action. Dans un élan mêlant ambition et parfois naïveté, on veut changer le monde. Le vote étudiant suit cette tendance et par conséquent, se traduit fréquemment dans des mouvances révolutionnaires, pas forcément dans le sens littéral du terme, mais dans une volonté protestataire et de changement. La position des jeunes se fonde donc d’abord sur un désir d’autonomie et de non-embrigadement dans les organisations politiques traditionnelles.
Par ailleurs, il est très à la mode d’accuser les jeunes de ne pas s’intéresser à la politique.

En plus d’être un raisonnement caricatural, il est erroné. La majorité des jeunes s’y intéressent et sont habités par l’idéal démocratique, mais ne le font simplement pas de la même façon que leurs aînés. En effet, les partis et la manière dont on fait de la politique aujourd’hui leur inspirent la défiance. À force d’avoir convergé vers le centre pour plaire à une classe moyenne grandissante, les partis traditionnels n’ont plus osé le clivage, et une partie de la population s’est sentie délaissée, laissant un boulevard aux extrêmes qui, quant à eux, promettent un récit. En tant que jeunes, on vote moins, mais quand on vote, on est plus attiré par les extrêmes, car ils portent un projet de rupture. La preuve en est: au 1er tour des élections législatives en France, plus de 60% des votes des 18-24 ans étaient dirigés vers des candidats issus de la NUPES ou du Rassemblement National, alors que leur taux
d’abstention était de 69%.

Mais alors, quelle place pour le libéralisme dans tout cela ? Aujourd’hui, le libéralisme politique a fait son trou et nous pouvons nous réjouir de vivre dans une démocratie libérale. Quant au libéralisme économique, force est de constater que malgré les défauts du système capitaliste actuel, celui-ci nous a permis d’augmenter de manière vertigineuse notre niveau de vie, notre pouvoir d’achat et notre bien-être. Ainsi, le libéralisme serait-il condamné à incarner l’idéologie de la défense du statu quo ? Comment convaincre les jeunes si tout ce que celui-ci propose n’apporte aucune perspective de changement fondamental face aux défis socio-économiques et climatiques ? Pourtant, à l’origine, les libéraux étaient considérés de gauche, car profondément révolutionnaires vis-à-vis de l’Ancien Régime et du conservatisme. Karl Marx lui-même disait que le principal adversaire du conservatisme était le libéralisme. Celui-ci aurait donc dans ses gènes les racines pour faire naître un engagement protestataire et radical dans sa démarche…

Très bien. Les jeunes ont tendance à voter pour une idéologie ayant pour ambition de challenger le statu quo. Alors que fait-on? Il semble maintenant primordial d’amener une nouvelle façon de concevoir le libéralisme. Une autre manière de le raconter et de le discuter. Nous avons besoin d’un récit, d’une utopie libérale. Être constamment dans le concret et plus jamais dans l’idéologie, celle qui fait rêver, qui ose espérer un avenir plus radieux, ne pousse pas les gens à adhérer à notre vision de ce qu’est une société bonne. Pour les jeunes en particulier, il est très important d’avoir un récit. Les partis extrêmes sont ceux qui ont les plus fervents supporters, justement parce qu’ils sont ceux qui ont le récit le plus fort. Le monde politique, à force d’être tellement ancré dans le concret, à négocier chaque virgule de chaque proposition, a perdu le véritable sens derrière les mesures, l’idéal auxquelles elles se réfèrent. De ce fait, on a perdu toute notion d’idéologie et finalement on a perdu les gens. Nous avons fait le choix en Belgique de nous éloigner des fondements idéologiques propres, de l’incarnation d’un idéal. Pourtant, ce sont justement ces pensées, ces aspirations qui font que les citoyens ont envie de s’engager corps et âme pour porter activement un projet, non pas pour soutenir telle ou telle “mesurette”, mais bien parce qu’ils y croient profondément. Il est temps de prendre du recul avec la gouvernance dans les débats et se pencher plutôt sur le type de société que nous souhaitons mettre en place, sur le modèle que nous défendons.

Les jeunes ont besoin de perspectives afin de pouvoir évoluer. Il est donc nécessaire d’établir une vision du monde telle qu’elle pourrait faire rêver une population sans cesse en quête d’idéal à atteindre. Pour ce faire, il nous semble primordial d’avoir un récit. Une histoire à raconter. Sans une perspective à laquelle tendre, jamais une idéologie ne pourra fédérer. Le défi est maintenant d’atteindre cet objectif d’identification précis de l’utopie idéologique. Les jeunes d’aujourd’hui forment la majorité électorale de demain, il faut donc bien saisir quels sont les sujets qui les inspirent particulièrement.

Restons réalistes, le but ici n’est pas de révolutionner le libéralisme ou sa communication, mais d’amener avec humilité quelques pistes de réflexion qui pourraient, à nos yeux, avoir un impact sur le vote des jeunes et la création d’un récit, permettant ainsi de rassembler derrière une cause commune et de donner un second souffle à ce libéralisme trop souvent caricaturé.

Le libéralisme n’a pas gagné. D’une part, les partis libéraux ne sont pas en tête des résultats électoraux. D’autre part, un regard critique sur le système en place ne permet pas d’affirmer une supériorité de l’idéologie libérale à bien des égards, et certainement pas dans le domaine de la redistribution. Nous sommes dans de nombreux domaines bien loin du rêve libéral initial. L’idéologie libérale a les clefs pour la résolution de tous les défis en cours et à venir. Tout simplement parce que l’émancipation, le pragmatisme et le développement personnel sont des concepts primordiaux pour une société juste et pérenne.

Pour ce qui est de relever les grands défis de notre génération, le libéralisme est assurément la porte d’entrée la plus efficace. Le défi climatique, qui nous impacte toutes et tous, nécessite les bons outils pour être résolu. Seule l’idéologie libérale permettra de relever le défi climatique en préservant nos libertés fondamentales et sans créer de fracture sociale. Grâce à des choix industriels forts et une confiance rationnelle dans le progrès technologique, nous serons en mesure de résoudre les problèmes environnementaux plutôt qu’employer des politiques publiques répressives qui ne mèneront qu’à des tensions sociales et discriminations.

Avec une population de plus en plus éduquée, une société civile bouillonnante n’attend que de pouvoir créer des projets qui font sens afin d’avoir un impact à sa manière. Le monde de l’entrepreneuriat, pourtant si cher aux libéraux, n’est pas assez alléchant. Alors que celui-ci est supposé motiver les jeunes à prendre leur avenir en main, les obstacles posés par l’État (taxe, bureaucratie administrative, capital de départ nécessaire) sont nombreux et trop souvent source d’un découragement compréhensible. Si les citoyens avaient accès à une fiscalité plus simple et plus souple pour les entrepreneurs, si les citoyens pouvaient créer une entreprise en quelques clics comme c’est le cas dans d’autres pays de l’UE, s’il n’était pas nécessaire d’être riche pour le devenir, l’état ne serait plus un frein au développement, mais un filet de sécurité. Encourageons les initiatives au lieu de les bloquer.

Les questions identitaires prennent de plus en plus de place dans les débats et suscitent énormément de réactions. Ces thèmes, d’ailleurs très souvent repris par la gauche, sont des remises en question de la place du citoyen dans la société. Ne désirons-nous pas tout simplement une égalité totale de traitement, que la personne peu importe son origine, sa culture ou ses opinions ? La réponse du libéralisme est bien évidemment celle de l’ouverture aux autres et non pas du repli sur soi. Vivre ensemble, et ne pas vivre les uns à côté des autres. L’universalisme fait partie intégrante de la tradition libérale. Peu importe l’orientation sexuelle, le genre, la religion ou la couleur de peau. Ce qui importe c’est que nous sommes tous des citoyens et que nous sommes tous égaux dans nos rapports aux autres. Ainsi, ce n’est pas aux médias ou à qui que ce soit de donner des leçons sur la marche à suivre pour ce qui relève du privé. Ce que les gens font chez eux, cela ne regarde qu’eux. La vie privée, par essence, n’est pas politique. Faites ce que vous voulez. Voilà le cœur de la vision libérale des rapports sociaux. Si tout le monde a le droit à la même chose, pas de discriminations.

Le libéralisme a le pouvoir de ramener l’optimisme de la solution et de faire rêver toute personne adhérant à l’idéologie. Par le développement personnel, l’émancipation, la liberté, le courant de pensée à la capacité de tirer son épingle du jeu. Si aujourd’hui nous nous engageons à faire en sorte que cette vision du monde soit concrétisée, c’est parce que nous sommes persuadés que les grandes solutions aux problèmes qui nous font face se situent dans une perspective libérale. Ce courant de pensée est celui qui a permis, en s’adaptant toujours aux problèmes encourus via le progrès, à améliorer sensiblement le bien-être commun.
Le récit libéral n’est certainement pas mort, mais il s’agit de le réenchanter.

Pierre De Saint Moulin & Antoine Dewit

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